1ère Tentative d'évasion - Le 3 mars 1942.
Je devais partir à pied à la Gare d'ALTENBERG (Saxe GMP) à 3 heures du matin. Je suis donc sorti avec l'aide de quelques camarades, en passant par une fenêtre qui était "barbelée". Habillé en civil un peu légèrement. Pas de chance pour le temps, il neigeait. Je suis donc arrivé à la gare à l'heure. Je retrouve sans peine le groupe de 20 volontaires qui partaient en France. Le chef de ce groupe s'approcha de moi en me disant que ce n'était pas la peine d'essayer de se mettre dans le groupe, car la police les comptait à chaque instant, et que je n'avais aucune chance de réussir. Moi j'étais décidé à partir, et je suivis le groupe jusqu'au train en prenant un billet pour une gare proche. Me voilà dans le train qui devait m'emmener en France. Tout allait bien, mon espoir était grand. On roula jusqu'à une petite gare, et 1à, on devait changer de train. Je réussis à changer de train et en direct pour la France. à ERFURT (land de Thuringe GMP), halte du train. Contrôle. Un contrôleur passa dans notre compartiment. Je comptais un peu sur la pagaille de ce train bondé, on ne pouvait pas se bouger. Ce fut ma perte, J'ai toujours cru que ce contrôleur avait mon signalement, car il me dit en français « Monsieur, vous êtes le prisonnier n° 23047 ». J'ai su par la suite que j'avais été signalé par notre homme de confiance qui avait donné tous les détails. Je suis donc descendu du train. Il neigeait. Pas question de fausser compagnie, il faisait si froid. A la gare, on rassembla tous les évadés du train. Civils volontaires, sans permissions, STO et prisonniers de guerre, on était bien plus de 100. Chacun du suivre un policier ou une sentinelle. Pour ma part, j’ai passé la nuit à la prison de la caserne dans une cellule et je suis resté 3 jours avant qu’ une sentinelle vienne me chercher du camp d'ALTENBERG. En attendant le train pour ALTENBERG, j’aurais pu lui fausser compagnie cent fois, mais pas de question avec le temps qu’il faisait, neige et froid.
Me voilà donc au camp – baraque des évadés -. Pantalon rouge. La baraque était bien chauffée, on était 40 ou cinquante, on passait son temps à la corvée du quartier le matin, et la soirée on se racontait des histoires d’évasion. Il y en avait de terribles, mais aussi de très tristes.
Au bout de quelques jours, ce fut la cellule pour 3 semaines, à 3 par cellule. Rien de très grave, ce fut vite passé.
Nième Enième départ pour le travail - A 7 évadés pour une « Carrosseriefabriek » (Atelier de Carrosserie GMP) à Altenburg. Je suis resté là 6 mois, avant ma 2ème tentative d’évasion.
Tous les 7, on ne parlait qu'évasion, pourtant je leur avais toujours dit que c'était moi qui partirais le premier. Je remis çà tout seul. Personne de décidé à partir. Dans un sens, j'avais une grande confiance en moi, et un copain aurait plus été une charge.
Je préparai donc minutieusement mon départ. Toujours par le train, mais le train de marchandises. On était à 40 km de LEIPZIG (land de Saxe). C’est le mois de septembre. Je savais par les évadés qu’il était assez facile de repérer un wagon en départ pour la France.
Il faisait beau et je pensais aller à pied en 2 ou 3 jours et nuits à LEIPZIG. Le départ se fit sans grand peine. Un dimanche de promenade, j’ai laissé retourner les copains et moi j'ai continué en direction de la gare des marchandises, mais habillé en « Gefangener »(prisonnier GMP). De jour, il était facile de circuler ainsi, personne ne s'occupait de nous. Je passai ma première nuit à la belle étoile dans un petit bois. Au matin, je m'apprêtais à partir pour la gare. Un chien et un policier me dénichèrent avant mon départ. Ce fut fini. Il fallait suivre. J'ai passé la nuit dans la gendarmerie du petit pays, et le lendemain, retour au camp d'ALTENBURG, à la baraque des évadés que j'avais quittée 6 mois plus tôt. Mêmes cérémonies. L'interrogatoire, "Pour vous punir, je vous renvoie dans votre commando, vos copains vous casseront la gueule" me dit l'officier de l'Abwer (la défense GMP). J'aurais bien été content d'y retourner on n'y était pas mal. On m'envoya chez un "Klempnermeister" maître ferblantier.
Nième Enième départ au travail - Là je travaille avec mon patron et son oncle. On était à 3, j'étais un peu l'apprenti et manœuvre. Je n'étais pas mal. On était à mars 43. Je couchais dans une "Zukerraffinerie"(raffinerie de sucre GMP) avec une quarantaine de camarades dont la bonne moitié étaient des anciens évadés. Là on a eu de bons moments. Le sucre bonne monnaie d'échange ne nous manquait pas. II n'y avait qu'à le prendre. J'avais même fabriqué un alambic et on fabriquait de l'eau de vie de sucre, ça remontait. Mais cela ne dura pas longtemps, il fut question d'en commercialiser, mais on ne s'entendit pas et j'arrêtai de bouillir.
Là je suis resté 1 an. Une partie des camarades, presque tous, ont été transformés en civils, alors qu'on était à 3 qui n'en voulurent pas. Il me fallut changer de camp. Je ne changeais pas de patron, mais je changeais de commando. J’avais de la liberté, car pour aller à mon travail, je n'étais pas accompagné. J'allai donc au commando de ROSITZ (Thuringe GMP), une cinquantaine de français prisonniers étaient gardés par une ou 2 sentinelles. Je pris vite contact avec des civils qui avaient droit à des permissions. J'en trouve un qui n'avait pas de famille et qui préférait rester en Allemagne durant sa permission. Ainsi je préparai ma 3ème évasion.
A ce moment-là, je commençai à prendre patience. Les américains étaient débarqués depuis juin, et la guerre ne devait plus durer longtemps. Je changeai bientôt de commando, et de patron. Je suis allé au commando de GOSSNITZ (Thuringe GMP). J’étais détaché à PONITZ (est du land de Thuringe GMP), chez le forgeron maréchal du pays. C'est là que j'attendis la libération par les américains le 25 mars 1945
Retour dans mon foyer le 25 avril 1945.
Source : Antoine et Joseline Carré - Note GMP : Groupe Mémoire et Patrimoine.
recherches en cours