L’Aiguillon-la-Presqu’île : Différence entre versions
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Le port de l’Aiguillon
Situé sur la rive gauche de l’estuaire du Lay, le port de l’Aiguillon-sur-mer donne son nom à la baie dans laquelle se jette la Sèvre Niortaise. La petite cité est assise sur des couches géologiques formées par des sédiments meubles (vases et sables) amalgamés à des débris organiques (végétaux, algues, coquillages variés) et dont l’épaisseur peut être estimée à une soixantaine de mètres. Il faut chercher sous ces strates le socle calcaire dans lequel le lit majeur de la Sèvre Niortaise était incisé vers – 20.000 ans. Le Lay était alors un affluent du fleuve qui cheminait au sein d’un véritable canyon et se jetait dans l’océan à plusieurs dizaines de kilomètres de la côte actuelle. C’est la remontée du niveau des océans au temps de la transgression flandrienne (vers – 10.000) qui a enclenché le phénomène de sédimentation, toujours très actif aujourd’hui et responsable des strates sédimentaires qui constituent le sol actuel. Lorsque la mer s’est retirée pour atteindre son niveau actuel, le Lay a dû se frayer un chemin à travers ce paysage engraissé de sédiments. Autour de l’An Mil, l’interface terre-mer du Lay devait ressembler à un delta aux bras séparés par des îlots de sable dont les actuelles dunes sont les héritières. Ces îlots finirent par se souder les uns aux autres, mais de manière assez imparfaite, si bien qu’à chaque grande marée et a fortiori par temps de tempêtes, l’eau de mer venait rouvrir les bras un temps comblés. Le bras principal de ce delta était initialement situé du côté de la pointe du Grouin, à La Tranche-sur-mer, mais l’accumulation de sables (issus de l’érosion côtière ou du charriage par la Loire) a forcé à l’errance l’embouchure de cet affluent, devenu fleuve. La vallée du Lay se fraya un passage vers un deuxième exutoire, à l’est du premier. Un troisième paléo-estuaire s’est ensuite organisé du côté de la Belle Henriette (La Faute-sur-mer) : c’est celui que Claude Masse a cartographié au début du XVIIIe siècle. Un siècle plus tard, le tracé actuel, orienté nord-ouest sud-est, s’est finalement imposé. Ainsi brossée à grands traits, l’histoire géologique du pays de l’Aiguillon est marquée par la très grande inconstance du rivage qui caractérise les lieux. Sur le bri, qui est la formation géologique issue de la stabilisation des sédiments fins, accumulés depuis la transgression flandrienne, d’importantes quantités de sable sont venues se fixer. Aux temps historiques, le réseau hydrographique du sud Vendée est resté tributaire de l’errance de ces sables. Fleuves et rivières avaient tracé leur route dans le bri, donnant naissance aux marais littoraux, mais ils restaient contraints de se frayer un chemin à travers les dunes pour rejoindre l’océan. Les installations humaines ont également dû composer avec cette spécificité. La fixation de l’actuel estuaire du Lay, entre la pointe d’Arçay en rive droite et celle de L’Aiguillon en rive gauche, n’a pas mis fin à l’inconstance du rivage. L’image se précise aux temps historiques, grâce aux archives qui retracent le destin de la communauté humaine du village et du port de L’Aiguillon. La présence de L’Aiguillon est également facteur d’enjeux (activités, aménagements, habitations) qui mettent en lumière les conséquences de la mobilité du trait de côte, l’aléa qui vient graduellement affecter l’économie et la société locales.
En l’espace de trois à quatre siècles, depuis le XVIIe siècle, la sédimentation du sable a modelé ces territoires, par l’intermédiaire de flèches en progression – le géologue utilise le terme de progradation – du nord vers le sud, encadrant le cours du fleuve. La construction des deux rives de l’estuaire résulte de la combinaison de deux systèmes de transport des matériaux. Le premier système est océanique et tient à la dérive littorale, qui arrache les sables du littoral du côté du Jard-sur-mer ou de La Tranche, pour le déposer au nord de la baie de l’Aiguillon. Le second système tient à la marée et affecte spécifiquement l’estuaire du Lay. Deux fois par jour, au moment du reflux, le mouvement des eaux marines est alors grossi du débit du fleuve dont le bassin versant draine toute la moitié sud du département de la Vendée. La progression de la flèche de La Faute (rive droite) en est confortée. Elle pèse mécaniquement sur le tracé de la rive gauche, celle de L’Aiguillon, en la repoussant toujours plus vers l’est. Il s’agit d’un cas d’école de géomorphologie : la progression d’un poulier (Pointe d’Arçay) met en tension permanente son musoir (la flèche de L’Aiguillon). Les pointes de L’Aiguillon et d’Arcay/La Faute correspondent à deux flèches sableuses larges (L’Aiguillon : 700m. ; Arcay : 900m.) et longues (L’Aiguillon : 13 km. ; Arcay : 9 km.) Les dunes de la Pointe de L’Aiguillon, rive gauche, forment un ensemble discontinu. Au nord, elles supportent l’habitat groupé du bourg mais à la Pointe, ces dunes correspondent à l’extension de la flèche entre 1700 et 1960. Ces deux systèmes dunaires étaient initialement reliés. Ils sont aujourd’hui disjoints, unis par une digue. Le secteur endigué résulte d’une mise en défense du trait de côte face à l’érosion du musoir, de sorte que les deux dunes, celle du bourg de L’Aiguillon et celle de la Pointe, sont les vestiges de la flèche continue, cartographiée par Claude Masse en 1705. La partie aujourd’hui disparue – et endiguée – était alors suffisamment basse pour que le géographe du Roi Louis XIV ait renoncé à la qualifier de dune pour préférer parler d’une « langue de sable qui ne couvre qu’aux marées extraordinaires ». L’érosion qui l’a affectée a été provoquée par une diminution ou un arrêt de l'alimentation sableuse, rupture des apports en sable consécutive à la formation de la pointe d'Arçay / La Faute, rive droite, combinée aux effets de chasse de l’estuaire. C’est pourquoi un endiguement de défense (la digue dite « du Génie ») a stabilisé le recul de cette côte, dans le but de protéger les polders de l'Anse de l’Aiguillon d’une submersion venue de l’estuaire. C’est en 1843 que la municipalité de L’Aiguillon a réclamé la mise en chantier de cet ouvrage. A peine achevée, la digue subit une érosion telle qu’un nouveau chantier dut être ouvert sur la période 1857-1859, à nouveau interrompu par les destructions des tempêtes des 25 octobre et 25 décembre 1859. De nouveaux travaux reprirent en 1863, donnant lieu à l’installation d’une voie ferrée Decauville entre l’île de La Dive, utilisée comme carrière, et la digue, que l’on s’était désormais résolu à ériger en pierres sèches. De nouvelles tempêtes, des obstacles techniques et des avaries d’une part, puis la guerre contre la Prusse (1870-1871) de l’autre, retardèrent l’achèvement du chantier, intervenu en 1876 seulement. Le revêtement maçonné (1.700 m. de long) ayant résisté victorieusement à la tempête de novembre 1875, il fut finalement décidé d’en recouvrir l’ensemble de l’ouvrage. Ce fut achevé en 1882, avec le réunion d’un syndicat forcé, la commune et les syndicats de marais ayant refusé toute contribution à l’amiable. Durant tout le XXe siècle, il a fallu travailler à entretenir, réparer et renforcer cet ouvrage.
Bien plus que l’intégrité de la flèche sableuse de L’Aiguillon, ce sont les enjeux situés à l’arrière de cette digue qui sont à l’origine de ces travaux. La rive gauche du Lay est en effet adossée vers l’est à de vastes prises résultant de la conquête des rivages de l’Anse de l’Aiguillon. Le front pionnier de ces assèchements a été lancé au Moyen-âge, à proximité de Luçon, aujourd’hui situé à 30 km au nord de l’anse. Sur son passage, la conquête de direction nord-sud a relié l’île de Saint-Michel-en-l’Herm au continent (XIIIe siècle). Après une interruption durant les guerres de Cent Ans et les guerres de Religion, elle a repris au XVIIe siècle, reliant une nouvelle île, celle de la Dive aux prises plus médiévales. Ininterrompue depuis le XVIIIe siècle, cette colonisation agricole s’est achevée en 1965, après l’aménagement d’une 7e génération de digue, au droit de la Pointe de l’Aiguillon. Cette géohistoire a un temps placé le port de L’Aiguillon en position de débouché naturel d’une riche zone de production de céréales et d’élevage. Cependant, l’histoire des lieux fut d’emblée marquée par le caractère instable d’un tel environnement, qui transparaît dans l’appréciation qu’en livre Claude Masse en 1705. Sa reconnaissance du littoral bas poitevin (la Vendée actuelle relève alors du Poitou) fait de L’Aiguillon, en 1715, un village ne comptant guère que « 40 feux. Les maisons ne sont que de boue couvertes de paille, ce qui n’est pas commun dans ce pays. » La pauvreté des habitants découle du caractère ingrat et précaire de leur environnement. Ainsi Masse affirme-t-il qu’il n’y a « que 80 ans que ce village est commencé. Il était plus au sud, les sables ont obligé les habitants à l’abandonner. » Masse évoque ainsi L’Aiguillon (I), disparu dans les années 1630. Il ignore que L’Aiguillon (II) qu’il visite en 1705 est lui-même condamné par l’érosion du musoir sur lequel il est implanté : ce second site serait aujourd’hui immergé dans l’estuaire, en face du secteur actuel de La Pergola. C’est vers 1752 que les habitants s’alarment des « flots de la mer qui envahissent insensiblement les terrains formant la pointe de L’Aiguillon » où ils avaient leurs salines et leurs meilleurs champs. Trente ans plus tard, la mer achève de submerger prairies, vignes, champs, marais salants. En moins de 6 années le village a été totalement submergé. En 1782, ne restait plus que le manoir seigneurial au pied duquel les flots venaient battre à chaque marée. Il en résulta que les seigneurs de L’Aiguillon se trouvèrent dans la nécessité de concéder des terrains aux malheureux habitants expulsés de leurs demeures. L’actuel village de L’Aiguillon (III) apparaît sur les cartes vers 1820, sous la forme d’un lotissement aux rues parallèles, évocateur des villes-nouvelles de l’Ancien Régime. Petit port d’exportation de denrées locales, c’est d’ailleurs sous l’appellation de « Nouvel Aiguillon » que l’on retrouve la trace du village actuel dans les archives, à la faveur de l’entrée d’un navire chargé de fèves, dans le port de Tonnay-Charente, en 1787. Dans la première moitié du XIXe siècle, le port de L’Aiguillon profite de la fin du monopole d’exportation des grains en faveur de Marans et des Sables d’Olonne, pour s’imposer comme le point d’exportation des céréales du sud de la Vendée. En 1839, 269 navires sortaient du petit port du Lay et ils étaient 528 en 1896. Cependant, l’envasement progressif de l’estuaire et l’arrivée du chemin de fer en 1901 eurent bientôt raison de cette activité commerciale. Les Relais de mer, ouvrage témoignage que l’historien Louis Chevalier, né en 1911 à L’Aiguillon-sur-mer, a consacré à son village, constitue un précieux document d’ethnohistoire et de mémoire. Il permet de comprendre la reconversion du port de commerce vers le port de pêche et de conchyliculture. Après la première guerre mondiale, à L’Aiguillon, « le village reste celui du XIXe siècle, et même des temps plus anciens encore, où les gens commençaient à s’installer à proximité des vases » donc de l’estuaire « la côte, c’étaient en contrebas des maisons, les relais de mer qu’on traversait pour aller au port. » Quant aux habitants du bourg, « c’étaient tous des paysans. Leurs maisons, de construction basse, à moitié enfoncées dans la terre – il fallait descendre une marche pour y entrer – étaient bâties sur le talus, l’ancienne dune couverte d’herbe (…) en contrebas de laquelle, dans une sorte de vallonnement, se cachaient les jardins et des morceaux de vignes. » La topographie de cet habitat traditionnel se maintiendra jusqu’aux années 1950. On habitait sur les dunes, bien à l’abri des submersions, mais l’architecture s’était aussi adaptée à la contrainte des vents dominants, qui s’accordaient alors avec la rareté et le coût des matériaux. C’est pourquoi les maisons étaient basses, à l’exception de celles des quelques propriétaires tels Dagondeau ou Poupart à L’Aiguillon, qui se distinguaient par leur étage. Lorsqu’on descendait vers le Lay, les premiers endiguements accueillaient des champs cultivés qui voisinaient avec les relais de mer, les « misottes » submergées durant les malines et dédiées aux pâturages. Louis Chevalier évoque aussi le rapport à la mer, avec « Les Aiguillonnais (…) protégés de la mer par la longue presqu’île de sable à l’entrée de laquelle était La Faute. Grâce à l’embouchure du Lay et au jeu des marées, ils pouvaient utiliser la mer sans risque, en tirer profit aussi, combiner la culture et la pêche et puis, par l’intermédiaire des bouchots, passer de la terre à la mer sans avoir à redouter ses colères. » De ce rapport à la mer découlait une géographie très particulière du centre de la commune de L’Aiguillon : « le bourg, c’était les agriculteurs, le port c’était les autres. » Cette division avait aussi sa dynamique sociale car dans la première moitié du XXe siècle, « la terre rapportait de moins en moins pour un immense travail » tandis que « boucholeurs et pêcheurs gagnaient bien leur vie (et) avaient la perspective rassurante de leurs invalides », leur droit à la retraite garantie par l’Etat dans le cadre de l’Inscription Maritime. Les deux guerres mondiales passent pour avoir favorisé la biodiversité et les stocks de poissons, la mobilisation de la Grande guerre et l’Occupation ayant limité la pêche. La première moitié du XXe siècle a aussi abrité le développement de la mytiliculture (installation de bouchots dans l’estuaire) et l’ostréiculture a été importée par des Charentais du bassin de Marennes-Oléron dans les années 1930. La moule de Charron, de l’autre côté de la baie de L’Aiguillon, était connue depuis au moins le XVIIe siècle et commercialisée vers l’intérieur des terres, via le « port aux moucles » de Marans. En 1859, la société impériale zoologique d’acclimatation envoyait en inspection René Caillaud à l’embouchure du Lay. Dans son rapport, il écrit avoir « examiné les moulières de l’embouchure du Lay, bancs d’une inépuisable richesse, qui s’élèvent à plusieurs places sur le lit de la rivière » mais il ajoute plus loin que « les habitants de L’Aiguillon, presque exclusivement adonnés à la culture des terres, négligent tout soin commercial à cet égard. » Comme pour l’ostréiculture, mais dès avant la première guerre mondiale, les Charentais attirés par la manne naturelle offerte par les côtes du sud de la Vendée, vinrent installer leurs pieux de bouchots dans l’estuaire du Lay. Entre-deux-guerres, au moment où il accueillait les premières expériences d’ostréiculture, le port de L’Aiguillon se tournait résolument vers la mytiliculture. Quant à la pêche en mer, en 1897, celle du « poisson frais » était pratiquée par 53 petits bateaux (1,5 tonneau en moyenne) montés par 59 pêcheurs qui travaillaient d’avril à novembre. Celle des pétoncles et des palourdes était pratiquée l’hiver (de novembre à mars) par 23 pêcheurs à bord d’une dizaine de navires de 4 tonneaux en moyenne. Le port se spécialisait bientôt dans la capture des crevettes et comptait 123 pêcheurs pour 93 embarcations en 1906. Entre-deux guerres, cette flottille se maintint, tout en diversifiant ses pratiques de pêche : 9 ligneurs, 12 chalutiers et 18 fileyeurs en 1926. Dans les souvenirs de Louis Chevalier, le basculement du village de la terre vers la mer passe par une image, celle de la fermeture d’un café, le Bal Caradut, situé à l’entrée du village côté terre, vite remplacé par un nouvel établissement, le Bal Maratier, à deux pas du port. L’affaire se passait en 1930 et au-delà du symbole elle révèle le glissement du centre de gravité de L’Aiguillon vers l’estuaire, vers le Lay.
Après-guerre, la pêche en mer a vécu un recul important dans le port de L’Aiguillon avec 8 navires seulement : 3 fileyeurs et 5 chalutiers en 1956. Aujourd’hui, le port compte encore une vingtaine de navires de pêche artisanale, chalutiers, fileyeurs et caseyeurs. Cette flottille pratique aussi des pêches saisonnières : pêche de la civelle (la « piballe ») au printemps ; campagnes de pétoncles et de coquilles Saint-Jacques l’hiver. La mytiliculture s’est quant à elle développée régulièrement jusqu’en 1960. Une véritable filière d’élevage était alors en passe de se constituer à l’échelle nationale et elle promettait aux 108 boucholeurs de L’Aiguillon le rôle de fournisseurs de sujets juvéniles, pour des éleveurs situés sur les côtes charentaises et jusqu’en Bretagne. Vers 1950 on en était venu à implanter jusqu’à 300 pieux de bouchot à naissain (au lieu de 190 préconisés) sur chaque aile de 50 mètres de long. En juin 1960, apparut du côté d’Esnandes, en Charente-Maritime, un parasite du nom de myticola intestinalis Steuer qui entraîna une mortalité des moules. L’Aiguillon fut touché en 1961 : 80 % des moules périrent sur place. Avec l’appui de l’institut scientifique et technique des pêches maritimes (ISTPM) on observa que seuls les sujets de deux à trois étaient touchés. On résolut alors de hâter la croissance des moules, en réduisant la densité des pieux de bouchots, de manière à favoriser la croissance. Le redémarrage de l’activité mytilicole fut rapide. Dans les années 1990, on passa à la technique du captage sur des filières immergées dans le pertuis Breton. En 2000, l’Aiguillon sur mer ne comptait plus que 28 mytiliculteurs chefs d’exploitation dont les deux tiers pratiquaient aussi l’ostréiculteur sur la rive gauche de l’estuaire. L’ostréiculture aiguillonnaise a connu une trajectoire similaire. Elle a compté jusqu’à une trentaine d’entreprises au milieu des années 1970. Cette activité a pu s’appuyer sur le tourisme balnéaire pour trouver des consommateurs et asseoir sa réputation même si elle a connu, comme les autres bassins ostréicoles, l’anéantissement d’ostrea angulata (huître portugaise) suite à l’épizootie de 1971-72 et la prise de relais par ostrea gigas (huître japonaise).
Durant le dernier tiers du XXe siècle, si les activités traditionnelles du port de L’Aiguillon (pêche, conchyliculture) se sont pérennisées, c’est au prix d’une concentration des entreprises dont la productivité s’est accrue. Parallèlement, le littoral français a vu monter en puissance les activités de nautisme. Le département de la Vendée, avec des entreprises comme Jeanneau et Bénéteau, a largement participé à ce mouvement. Aujourd’hui, le port estuaire de L’Aiguillon-sur-mer compte trois fois plus d’emplacements pour la plaisance (64) que pour les professionnels (20). Le port de plaisance du Banc Cantin propose des aménagements bien insérés dans le paysage portuaire traditionnel de l’estuaire du Lay. Les appontements sont parallèles à la rive et chaque emplacement est séparé de son voisin par un alignement de pieux qui n’est pas sans rappeler les descriptions du port au milieu du XIXe siècle. Ainsi, une activité caractéristique du tourisme de masse semble-t-elle parvenue à reprendre les codes traditionnels du rapport à la mer entretenus dans la petite cité du Sud Vendée. L’envasement des rives du Lay a par ailleurs donné lieu à l’aménagement d’une plage et d’un plan d’eau artificiels. Sur ce plan d’eau, il est même possible de pratiquer le téléski nautique.
Comme ailleurs sur le littoral national, l’attractivité touristique a récemment importé de nouvelles pratiques, de nouveaux usages et de nouvelles images. Ce mouvement pourrait renvoyer les traditions à une forme de désuétude. C’est le cas en termes d’urbanisme, ce qu’a trop cruellement mis en évidence la submersion marine consécutive à la tempête Xynthia (27-28 février 2010). Toutefois, la reconnaissance des patrimoines paysager, bâti ou culturel revalorise tous les aspects de la vie traditionnelle en bord de mer, ceci avec de plus en plus de succès. Ainsi, le bourg historique s’organise-t-il autour de trois rues parallèles, que connectent une douzaine de ruelles traversières. Appelées « venelles » dans la langue du pays, elles sont étroites et n’avaient pas de noms. La tâche de les baptiser a été confiée en 2016 au conseil municipal des enfants, lequel a choisi des noms en rapport avec le thème de la mer, et ses activités traditionnelles, ce qui marque bien l’attachement de L’Aiguillon à son port et à ses activités maritimes.
Par Thierry Sauzeau